lundi 13 octobre 2008

Ontake


Ontake

par Simon Pierre Iwao



D’abord quelques mots sur le climat : ne pas oublier la forte chaleur et l’humidité oppressante de l’été japonais, d’autant que cette année nous avons bénéficié d’une augmentation de la température de 2 à 3 degrés (je pense que ce phénomène touche toute notre planète). Je rajoute le fait que la région de Nagoya est réputée pour être une des plus chaudes du Japon en été.







Mes activités « physiques » ont débuté par une première sortie en montagne les 2 et 3 août en compagnie d’un jeune yamabushi de mes relations qui m’accompagne souvent dans mes sorties « individuelles » à travers les monts Katsuragi (à la recherche de documents ou de vérifications concernant mon travail universitaire lié aux « ascèses en montagne » pratiquées par les yamabushi du shugendô). Avec deux femmes gyôja (adeptes pratiquantes) de son groupe shugen (du temple Seiganto-ji de Nachi, au sud de la péninsule de Kii dont les chemins de pèlerinages ont bénéficié en 2004 de la reconnaissance de l’Unesco), nous avons parcouru les terres de l’ensemble montagneux nommé mont Ontake, situé à 100 kms au nord-est de Nagoya, à la frontière du département de Nagano et de celui de Gifu.







Deuxième montagne la plus visitée au Japon après le mont Fuji et ancien grand centre religieux shugen, c’est un volcan encore en activité et nous avons pu apercevoir (et sentir) de grands jets de vapeur sulfureuse. Cela me ramenait quelque 20 ans en arrière car j’avais marché avec ma femme et ma fille âgée d’environ 2 ans à cette époque dans le parc naturel situé à la base du Ontake. Altitude 3067 mètres, ce n’était plus de la montagne moyenne mais de la haute montagne et, malgré cela, j’ai été étonné du nombre de pèlerins sillonnant les flancs de cette montagne vénérée par les Japonais.





Au dire de mon ami japonais, environ un millier de pèlerins ont dû parcourir les 2 et 3 août les sentiers balisés conduisant au sanctuaire Ontake-jinja situé au sommet ainsi que ceux menant aux différents « lieux de pratique », petits oratoires et sanctuaires disséminés dans les environs sur les cols et corniches ou près des lacs formés au fond des anciens cratères.








Sur le sentier principal menant au sommet depuis le parking de Ta no hara (2256m), il y eût même parfois des embouteillages lors de la montée du samedi 2 et beaucoup plus lors du retour du lendemain, quant à l’âge des pèlerins, cela allait des enfants de 2 à 3 ans (portés une partie du temps) à la vieille gyôja de 88 ans (à la santé de fer et qui faisait ce trajet une fois par an depuis ses 15 ans !!!) : 4 à 5 heures de montée abrupte et la respiration se faisait plus difficile avec l’altitude.





Évidemment la majorité des personnes faisait l’aller-retour dans la journée mais environ 200 à 300 pèlerins, dont nous, ont couché sur place dans des auberges-refuges-accueils (koya) : grande pièce principale où pouvaient loger environ 80 personnes dormant côte à côte, très bon repas japonais, couchage très chaud fourni (édredons, couvertures) et grand baquet d’eau chaude dans lequel tout le monde a fait trempette à tour de rôle (hommes et femmes séparés, chacun son baquet)!!!. À 8 heures du soir, tout le monde dormait à poing fermé et le matin à 5h, nous étions tous, hommes, femmes, enfants, en train d’applaudir le magnifique lever de soleil qui s’est voluptueusement fait admirer au son de la conque de mon ami yamabushi.





Puis tout ce monde s’est très rapidement dispersé dans le vaste paysage lunaire environnant, chacun suivant l’itinéraire qu’il avait prévu, ce qui fait que nous avons pu marcher dans une relativement tranquille solitude et nous rendre aux différents lieux de culte que mes compagnons yamabushi avaient prévu d’honorer.




Quel plaisir de fournir un effort soutenu à cette saison de l’année au Japon sans verser une seule goutte de transpiration, du fait de l’altitude. Nous avons même traversé un névé.




Je signale pour terminer que nous avons croisé un pèlerin particulier : cette gyôja d’une bonne quarantaine d’année, vêtue d’un simple vêtement blanc « pur », (shiromuku ou ryakujôe), en toile écrue, comme en portent les moines, ressemblant à un kimono de karaté, et coiffée d’un ayagasa, chapeau de forme conique aplati, en jonc tressé, protégeant des ardeurs du soleil ou des intempéries, faisait pieds nus les 4h de montée menant au sommet !!!!